Travailleur Indépendant: Conditions Générales de Vente (CGV) et Intérêts pour retard de paiement légalement applicables

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Il est très fortement conseillé d’inclure dans vos Devis et Factures vos Conditions Générales de Vente ou de Cession.

Ces conditions mentionnées sur un document signé par votre client pourront vous protéger vis à vis de la loi en cas de mésentente.

Rassurez-vous elles ne sont pas toutes inventées. Elle découlent notamment du Code du Commerce donnant le cadre légal pour les échanges commerciaux. On traitera ici plus longuement l’article L441-6 donnant une idée des temporalités légales de règlement des prestations et des indemnités légalement applicables en cas de retard.

Lorsqu’on vend une prestation…

En théorie, ça se passe comme ça:

  1. On reçoit une demande de prestation
  2. On envoie un devis
  3. Le client nous renvois le devis signé, et paye les arrhes ou acompte s’il y a lieu
  4. On effectue la prestation
  5. On rend le livrable

On aura pu envoyer la facture après le point 4 ou le point 5.

6. Le client nous paye !

En pratique tout ceci peut s’enchevêtrer:

> On aura pu demander des arrhes, acompte ou avances de frais

> On peut découper le paiement en plusieurs fois pour couvrir les différentes échéances (par exemple échéances: Réservation de la date, Acte de prestation, Rendu des livrables).

> Le client peut demander des modifications du rendu voire ne jamais être satisfait.

D’où l’intérêt d’avoir établit une sorte de contrat d’accord au travers des Conditions Générales de Ventes ou de Cession (de droits) qui établissent clairement le cadre des échanges. (C’est bien ce que font la plupart des entreprise, sites internet et applis…!?! Pourquoi pas vous ?)

Etablir ses propres CGV

Au début évidemment on n’a pas forcément idée de ce qu’il faut y inclure…
J’ai pour ma part commencé avec les CGV de la facture type fournies par le blog droit et photographie. On y trouve des conditions sur:

  • le paiement: délai, retard et non-paiement
  • l’utilisation des photographies par le client et par l’auteur
  • la mention légale de l’auteur (ou crédit photo)
  • la propriété de l’oeuvre

Ensuite petit à petit et avec l’expérience de certaines infortunes dont on a envie de se prémunir, on pourra faire évoluer ces conditions.
J’y ai pour ma part ajouté une découpe du paiement en 3 fois 1/3 pour suivre les 3 étapes de

  1. Réservation de la date (et couvrir les frais de déplacement investis)
  2. Acte de prestation (couvrir le temps passer en prestation et la vétusté matérielle)
  3. Rendu des livrables (finalisation du paiement pour clôre la valeur ajoutée)

Conseil: Vous devriez découper en 3 tiers la somme totale à verser à l’auteur ou TTC Auteur.

Recevabilité des CGV

On pourra aussi essayer d’encadrer le nombre ou le type de modifications que le client peut demander après rendu. C’est en cas de litige que l’on se posera la question de « si ces CGV son recevables ou non ». A chacun ses conditions.
Certaines seront cependant limitées par l’article du code du commerce qui fait loi: article L441-6 . En toute chose une mesure, ne soyez pas trop gourmand.

Etude de l’article L441-6

Voici l’article interprété pour le rendre plus intelligible à vous et moi photographes.
Je l’ai découpé en 12 points. Les portions en italique en sont directement tirées tandis que j’en écris mon interprétation en gras.
Je ne pourrais en rien être tenu responsable pour une « mauvaise » interprétation. Seul un professionnel du droit pourra vous aider pleinement.

1. Avoir des CGV

« Tout […] producteur/prestataire de services est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur […] qui en fait la demande […] . Elles comprennent :

  • les conditions de vente ;
  • le barème des prix unitaires ;
  • les réductions de prix ;
  • les conditions de règlement. »

-> Comprendre ici que tout professionnel doit avoir des CGV et que tout acheteur peut demander à les consulter. On pourra aussi dire qu’on n’en a pas (s’en remettant aux cas par défaut du Code du commerce) ou alors les avoir faites signer préalablement à tout échange commercial.

2.Un contrat de référence

« Les conditions générales de vente constituent le socle unique de la négociation commerciale. Dans le cadre de cette négociation, tout producteur/prestataire de services, peut convenir avec un acheteur de produits / services de conditions particulières de vente qui ne sont pas soumises à l’obligation de communication prescrite au premier alinéa. »

-> Les CGV sont un contrat liant le vendeur à l’acheteur. Ce sont elles qui constituent le premier texte de référence encadrant l’échange commercial. Ces CGV peuvent comprendre des conditions particulières qui ne sont pas parmi les 4 points obligatoires cités plus haut (conditions, barème,…).

3.Délai légal de paiement par défaut

« Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d’exécution de la prestation demandée. »

-> Par défaut, si on n’a pas convenu d’un autre délai dans les CGV, l’acheteur doit régler la facture de vente au plus tard le 30ème jour suivant la date de réception des produits ou la date d’exécution de la prestation.

4.Délai maximum

« Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser soixante jours à compter de la date d’émission de la facture. Par dérogation, un délai maximal de quarante-cinq jours fin de mois à compter de la date d’émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu’il ne constitue pas un abus manifeste à l’égard du créancier. »

-> Si l’on convient d’un délai particuliers dans les CGV, celui-ci ne peut légalement dépasser 60 jours « à compter de la date d’émission de la facture ». Ce délai pourra être poussé jusqu’à 45 jours après la fin du mois d’émission de la facture si cela est bien stipulé contractuellement et qu’on considère que l’acheteur n’abuse pas du vendeur.

5.Pénalité de retard

« Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. »

-> Si le délai contractuel de paiement est dépassé, les CGV doivent préciser les conditions d’application d’une pénalité et son taux, ainsi que le paiement d’une indemnité forfaitaire.

6.Taux de pénalité

« Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal, ce taux est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. « 

-> La formulation est un peu complexe…

Par défaut, le taux des pénalités est fixé au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) + 10%.
–> Le taux de refinancement de la BCE étant aujourd’hui à 0%, le taux de pénalité serait alors au minimum à 10%.

Si on décide de spécifier un autre taux de pénalités, celui-ci ne peux être inférieur à 3 fois le taux d’intérêt légal.

Taux d’intérêt légal pour le 1er semestre 2018 (source service-publique.fr):
3,73 % si le créancier est un particulier, donc 3 x 3,73 = 11,19%
     0,89 % pour les autres créanciers (professionnels, etc.), donc 3 x 0,89 = 2,67%

7.Semestre de référence

« Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l’année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l’année en question. Pour le second semestre de l’année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l’année en question. »

-> Le taux d’intérêt de la BCE applicable est celui au 1er janvier pour le 1er semestre et celui du 1er Juillet pour le second semestre.

8.Rappel

« Les pénalités de retard sont exigibles sans qu’un rappel soit nécessaire. »

-> Inutile d’avoir notifié l’acheteur de son retard pour lui appliquer le taux de pénalité.
(mais pour la bonne entente il vaut quand même mieux le faire je pense)

9.Indemnité forfaitaire

« Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l’égard du créancier, d’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. »

-> Lorsque le retard de paiement est avéré au vue des CVG ou des délais limites donnés précédemment, l’acheteur est redevable au vendeur au minimum d’une indemnité fixée par décret (apparemment 40€ depuis 2013).

10.Indemnité majorée

« Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification. »

-> Si vos frais de recouvrement dépassent le montant de cette indemnité, vous pouvez demander une indemnité supérieure en apportant des justificatifs…

11.Sauf procédure judiciaire

« Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due. »

-> …sauf si l’acheteur est proie à une procédure judiciaire lui permettant de ne pas payer.

12.Amendes

Je vous laisse interpréter par vous-même la portion de l’article donnant le montant des amandes encourues pour manquement au respect des lignes précédentes:

« VI. – Sont passibles d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et deux millions d’euros pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième, onzième et dernier alinéas du I du présent article, le fait de ne pas indiquer dans les conditions de règlement les mentions figurant à la première phrase du douzième alinéa du même I, le fait de fixer un taux ou des conditions d’exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa dudit I. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 470-2. Le montant de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »

Se faire payer

Au vu de cet article le créancier (le vendeur), est protégé pour tout retard de paiement de son client Débiteur (l’acheteur).

Il est en droit de lui demander

  • une indemnité forfaitaire pour couvrir les frais de recouvrement,
  • mais également une pénalité de retard selon un taux de pénalité appliqué au montant du

L’indemnité forfaitaire est de 40€ sauf si l’on peut prouver un coût supérieur.
La pénalité de retard peut être spécifiée par le vendeur dans ses CGV. Elle est à priori de 10% de la somme due, mais peut-être variable sans toutefois être inférieure à 11,19% (pour un particulier) ou 2,67%(pour un professionnel).

En soi, si après 45 jours fin de mois de délivrance de la facture/fin de la prestation on ne m’a pas encore payé, je peux légalement demander à mes clients de me verser

  • 40€ de frais de recouvrement
  • 2,67 à 10% de la somme due en plus de cette dernière

Cependant, je peux être sur qu’ils ne « m’auront pas à la bonne » et risquent de ne plus vouloir travailler avec moi. Le dilemme politique… Autant les relancer plusieurs fois et n’invoquer cet article qu’en dernier recours.

Bon courage pour vous faire payer ! ;)


Mon expérience au jour du 23 Mars 2018

Un client était en retard de paiement pour une facture émise le 07/04/17 pour un service effectué à la même date. Il est donc légalement entré en retard de paiement 30 jours plus tard, soit le 07/05/17.

Après diverses relances auprès de mon contact dans l’entreprise, j’ai directement contacté l’un des dirigeants.

« Aussi avec votre accord j’appliquerai symboliquement l’article L441-6 du Code de commerce mentionné dans mes conditions générales de cession sur la facture mentionnant un intérêt sur le retard de paiement. »

Celui-ci m’a rapidement répondu:

« Toutes nos excuses pour ce délai de paiement, malheureusement cela aura échappé à notre vigilance.
Afin que je m’occupe de vous régler le plus rapidement, merci de me renvoyer la facture rééditée avec les intérêts de retard. « 

Je lui rédige donc une nouvelle facture avec:

– taux de charges (salariales /patronales) de l’année 2018
– pourcentage de retard égal à 10% du TTC pour la totalité de la durée du retard
– 40€ pour frais de recouvrement

J’applique les pénalités de retard après mon TTC précédemment calculé et ces derniers ne sont pas soumis à TVA.

Capture d’écran 2018-03-23 à 18.28.38


Références

Annexes

Mes Conditions Générales de Cession – CGC (au 01/01/2018)

1) Échéances de paiement

1/3 du montant Diffuseur TTC est due à validation du DEVIS et avant la prestation, 1/3 à date de la PRESTATION, 1/3 au RENDU des livrables.

2) Retard de paiement

Tout retard de paiement au delà des échéances + 30 jours donnera lieu au paiement d’intérêts au taux minimal prévu par l’article L441-6 du Code de commerce (intérêt légal multiplié par trois), exigibles de plein droit et sans rappel, calculés sur les montants TTC.

3) Cas de non-paiement

Le non-paiement entraine la résolution de plein droit du contrat de cession et l’impossibilité d’utiliser les médias concernés.

4) Utilisation des livrables

La communication et l’utilisation des médias dont il est question ici sont soumises aux dispositions du Code de la Propriété intellectuelle.
Toute utilisation non prévue à la présente cession devra faire l’objet d’une nouvelle cession calculée sur la base des barèmes en vigueur.

5) Crédit/Mention de l’auteur

La mention du nom de l’auteur est obligatoire sur ou à proximité directe de chaque utilisation du média.

6) Propriété physique de l’œuvre

Le paiement des frais de support et/ou de production n’implique pas la propriété physique de l’œuvre.

7) Modification des médias rendus

La modification non prévue des médias (édition d’image, retouche « Photoshop », modification d’une vidéo, …) fera l’objet d’une nouvelle facturation.

8) Utilisation des livrables par l’auteur

Sauf avis contraire, l’auteur se réserve le droit d’utiliser les médias issus de ce travail à des fins de communication de son activité professionnelle.

9) Accord du Devis/Facture

La signature, ou paiement vaut pour validation.

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